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S2. Jour 33. La communauté de l’orteil.

Argagnon-Arouet 22km. Cumul : 739km.

Pierre et Enzo sont derrière moi, à une ou deux étapes, depuis leur pause à Condom et leur détour par un petit festival de musique. Je n’ai pas de nouvelles précises mais je sais qu’ils avancent puisque je reçois depuis 3 jours des photos de mon « tag ive » qu’ils découvrent à l’arrière d’un panneau ou sur des livres d’or. Je trouve ce jeu de pistes assez sympa. Je suis un Petit Poucet qui laisse des « peace and love » sur son chemin que retrouvent ainsi ceux qui passent après moi. Cela me donne envie de continuer de semer ce signe…

Aujourd’hui j’ai retrouvé Mariana l’ukrainienne que j’avais quittée avant Cahors. Elle était partie devant. J’avais pris derrière elle une autre direction pour rejoindre mon gîte. C’était un peu comme un malentendu. Notre retrouvaille est encore l’effet d’un hasard fou. Elle était arrêtée à une informelle « pause pèlerin » (table chaises abri en bois). Elle allait repartir quand elle a entendu un groupe qu’elle ne connaissait pas s’inquiéter d’un Yves. « Yves? D’Aix en Provence ? » (parfois je dis « de Marseille ») Oui, oui. Alors elle m’a attendu. Sinon je ne l’aurais jamais revue. Elle était très contente. Moi aussi. En fait elle avait fait une pause aussi. Son mari est venu la rejoindre quelques jours. Elle a une tente maintenant. Elle essaie de dormir près des gîtes.

Au fait, pourquoi s’inquiétait-on de moi ?  Ce matin une petite vague s’est formée sur le chemin, sans préméditation, comme ça se fait. Il y avait avec moi Claudine et Jean-Michel, Paul, Christophe, Christian, Justine, et un couple que je ne connais pas. J’ai pris les devants en rythme lièvre, trois m’ont suivi à courte distance. Pris par mon élan de marche rapide je n’ai pas vu une balise-croix et me suis trompé de chemin. Les trois m’ont suivi. Je me suis aperçu de mon erreur (merci Visorando) et rebroussé chemin. Voilà pourquoi les derniers sont devenus premiers (merci Jésus) et se demandaient pourquoi nous n’étions pas à la pause avant eux.

Tout cela j’en conviens a peu d’interêt en soi. On ne philosophera pas sur cette anecdote du jour. Mais si je la raconte c’est pour vous faire entrer dans le quotidien d’un Camino qui n’est pas fait que de conversations profondes pour refaire le monde. Le Chemin c’est d’abord des kilomètres à faire, ceux et celles avec qui on marche un peu ou beaucoup, des questions sur les étapes, les gîtes, les épiceries, les boulangeries, les cafés, les distances, les dénivelés, la météo, les variantes, et puis bien sûr l’état de chacun, les bobos, les ennuis, l’état du corps et du mental, des nouvelles des uns, des questions sur d’autres… Ce sont des routines, un quotidien où Yves qui « n’est pas encore arrivé alors qu’il était devant » devient un événement.

J’aime cette simplicité des problèmes et cette fraternité spontanée qui rassemble les pèlerins dans une informelle communauté de destin.

On a tous le même objectif, plus ou moins éloigné, on est tous confrontés aux mêmes difficultés.Nous ne sommes pas en compétition. Nous n’avons pas d’intérêts divergents.

Alors évidemment il n’est pas difficile de comprendre pourquoi de retour chez eux, les pèlerins pèlerines qui sont restés assez longtemps en immersion compostellienne ont un vrai coup de blues, durable parfois, et une seule idée en tête : repartir.

Voilà pourquoi je salue particulièrement ce soir mes trois chers amis faits en marchant, les mousquetaires Fred, Pierre-Alain. Éric, désormais de retour et qui m’ont déjà envoyé des témoignages de leur nostalgie du Chemin.

Je connais ça. Et comment vais-je revenir après ce second Camino ?

Je n’en suis pas là. L’événement aujourd’hui c’était aussi l’entrée en Pays Basque et le mur des Pyrénées qui se rapproche, ces crêtes blanches là-bas au fond du paysage verdoyant, et Justine la jeune fille qui s’exclame : « Que c’est beau! ». Justine qui juste après  s’est déchaussée pour nous montrer son petit orteil douloureux  et recueillir les doctes avis de cinq pèlerins rassemblés autour de son pied.

…………….

Je passe la main

Sur les herbes folles

Sensuelle caresse

 

Commentaires

  • Ça été le pieds, vous n en fera pas d autres étourdissement, en plus que vous râler d avoir trop marché des fois,mais cela vous fait du bien ,Courage , Racontez nous vos aventures, madame est venue avec vous ou vous l avez laissé au Ménage. Je plaisanté.

  • Bientôt le passage des Pyrénées…. Tu passes par la percée de Rolland ?

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