Boente-O Pedrouzo 27,5 km. Cumul 1153,5 km.
Depuis hier à Melide en fin d’étape le Camino Primitivo a rattrapé le Camino Frances. Je marche donc pour les 48 derniers km exactement sur les pas de mon premier Camino, il y a un an presque jour pour jour. Je n’y reconnais pas beaucoup de choses à part quelques « Albergues » et l’émouvante plaque souvenir d’un pèlerin mort ici à un jour de son arrivée à Santiago. Il avait 69 ans. Mes souvenirs restent flous, y compris sur mes derniers gîtes.
Nous sommes donc depuis Melide dans cette zone très fréquentée qu’empruntent aussi les « pèlerins des 100 derniers kilomètres » (suffisant pour obtenir la Compostella, sorte de diplôme du Camino). Cette « autoroute » finale concentre bien sûr tout ce qui peut irriter dans le Chemin de Compostelle : flot continu de pèlerins, quantité de « sans sac »ou « tourigrinos », groupes bruyants, et… cyclistes, dont la présence pénible suscite même de fréquents graffitis : « cyclists are not pilgrims ».
J’adhère à ce jugement. J’en avais parlé l’an passé. J’ai vu des agences qui se spécialisent dans le Camino à vélo (électriques bien sûr) et des affiches qui proposent aussi de le faire… en quad ! Et demain, ce seront probablement des troupeaux de trailers fluo qui afficheront leurs temps records !
Compostelle est en danger de massification et de diversification. Cela aussi je l’ai déjà dit. Le pèlerinage initial devient un produit de consommation. Vous en voulez combien ? 3 jours ? Une semaine ? Avec bagages qui suivent ? Avec véhicules ?
Cela dit ce n’est pas nouveau. Tous les lieux de pèlerinage, de Lourdes à La Mecque, en font un commerce lucratif. Compostelle n’échappe pas à la règle, et depuis le Moyen-Age.
Je ne vais pas ici revenir (voir Camino 1) sur ce que je considère pouvoir être un minimum d’éthique et d’exigences pour un Chemin qui permet une expérience de vie exceptionnelle. Je laisse chacun constater, juger s’il le souhaite, et penser ce qu il veut. C’est aussi cela la réalité du Chemin, mais je précise : surtout en Espagne, et surtout dans ces fameux derniers « 100 », et dans la ville de Santiago évidemment.
On ne peut pas facilement s’abstraire de ces sentiments mélangés que ces derniers « 100 » peuvent provoquer.
Il le faut pourtant. Parce que si les poubelles du Chemin débordent aujourd’hui je n’oublie pas tous les instants magiques, tous les élans mystiques, toute la belle nature, tous les lieux inspirants, toutes les émotions, tous les efforts acceptés, toute la volonté manifestée, toutes les stimulations intellectuelles, toutes les finesses de perception, tous les hauts et tous les bas, toutes les questions avec ou sans réponse, tous les instants de grâce, tous les moments de prière, tous les matins enchantés, toutes les douleurs surmontées, toutes les bières bues, tous les échanges, toutes les conversations, toutes les choses vues, lues, tous les territoires traversés, toutes les rencontres avec les autres mais aussi et surtout avec soi-même et avec ce qui nous dépasse… Tout cela n’est pas possible sans quelques dérives inévitables. A chacun de situer son seuil de tolérance.
Compostelle, c’est une Odyssée. Hier soir Emmanuel m’a fait connaître le magnifique texte d’un poète grec, Constantin Cavafy, traduit par Marguerite Yourcenar. Il commence par cela :
« Quand tu partiras pour Ithaque,
souhaite que le chemin soit long,
riche en péripéties et en expériences.
Ne crains ni les Lestrygons, ni les Cyclopes, ni la colère de Neptune.
Tu ne verras rien de pareil sur ta route si tes pensées restent hautes, si ton corps et ton âme ne se laissent effleurer que par des émotions sans bassesse.
Tu ne rencontreras ni les Lestrygons, ni les Cyclopes,
ni le farouche Neptune,
si tu ne les portes pas en toi-même,
si ton cœur ne les dresse pas devant toi. »
Et se termine ainsi :
« mais n’écourte pas ton voyage :
mieux vaut qu’il dure de longues années, et que tu abordes enfin dans ton île aux jours de ta vieillesse, riche de tout ce que tu as gagné en chemin, sans attendre qu’Ithaque t’enrichisse.
Ithaque t’a donné le beau voyage :
sans elle, tu ne te serais pas mis en route. Elle n’a plus rien d’autre à te donner. Même si tu la trouves pauvre, Ithaque ne t’a pas trompé.
Sage comme tu l’es devenu à la suite de tant d’expériences,
tu as enfin compris ce que signifient les Ithaques. »
Demain je retrouve Ithaque…
……………
Sur ce chemin
Tant et tant de pèlerins
Et moi et moi et moi
Commentaires
Voilà l'ultime étape, profite de ces moments qui seront les plus savoureux peut être.
Bravo encore pour cette année!
Très beau texte !
Bravo bravo bravo !
Tu l’as fait , et ça a eu l’air à te lire , plus facile que le 1er.
Tu n’as plus parlé de Mr P, ;bien sûr il doit être là mais tu lui as fait la nique!
Bonnes retrouvailles demain!
Bises à vous deux !
Très beau texte !
Bravo bravo bravo !
Tu l’as fait , et ça a eu l’air à te lire , plus facile que le 1er.
Tu n’as plus parlé de Mr P, ;bien sûr il doit être là mais tu lui as fait la nique!
Bonnes retrouvailles demain!
Bises à vous deux !
Quelle action en cette fin de match! Sur un tacle bien placé, dans les dernières minutes d'un match dantesque, Yves coupe l'herbe sous le pied de Mr P. et l'envoie rouler en touche. Sur sa lancée, Yves continue l'action seul, laissant derrière lui le malheureux poursuivant. Il n'a pas un regard derrière lui, son esprit est fixé vers l'objectif ultime. Une dernière foulée et....