Ok

En poursuivant votre navigation sur ce site, vous acceptez l'utilisation de cookies. Ces derniers assurent le bon fonctionnement de nos services. En savoir plus.

Jour 70. Le pas de bouddha.

Sarria - Portomarin 23 km. Cumul : 1531 km. Reste : 92 km.

Je croyais connaître la lenteur. Je ne savais rien, là non plus. Mais aujourd’hui j’ai fait à tout petits pas des progrès de géant. Ça je peux l’affirmer.

Cette fois j’ai commencé ma marche très lente dès le début. Je n’ai pas attendu que la douleur m’y oblige.

Au bout d’à peine un kilomètre, je rattrape une femme qui va encore moins vite. C’est pas possible ! Elle doit marcher à 2 à l’heure, et ce n’est pas qu’une expression. Je la dépasse à 2,5 km/h. Je me retourne, je l’interroge. Josée est québécoise et souffre … du talon ! Après trois jours d’arrêt, elle repart, comme elle peut. Elle a le sourire. Elle a le moral. Elle a un bâton de pèlerin. On fait un selfie. Quand je la quitte elle me dit ; »J’ai vraiment l’impression d’être un escargot «. Bienvenue au club ! Cela dit, moi, aujourd’hui, j’ai plutôt fait la tortue.

J’ai été injuste avec cet animal ignoré jusque là dans mon bestiaire. Il faut dire qu’il m’est moins familier que mes amis escargots. A sa façon, avec une régularité sans faille, j’ai avancé, au milieu des vaches, des moutons, et des églises. et J’ai fait une étape « normale » ! La douleur est restée  tolérable. Des quantités de lièvres m’ont doublé pour arriver finalement à Portomarin presque en même temps que moi. Comme ce trio de jeunes espagnoles en tenues très sportives  qui m’ont dépassé quatre ou cinq fois, après des arrêts prolongés aux bars-cafés. Elles commencent, comme tant d’autres, leur « pèlerinage » à 100 km de Santiago, distance minimale pour obtenir la « Compostella », et elles se prennent en photo devant leur premier tampon sur leur credencial. Ça me fait drôle…

Dans mon expérience de lenteur radicale j’ai repensé à un séjour de 24 h dans un monastère bouddhiste en Corée du Sud. On nous y avait initié à la marche consciente, méditative, la plus lente possible. Je n’étais pas prêt. Aujourd’hui je le suis, grâce au Camino.

J’ai repensé aussi aux pèlerins bouddhistes qui font des centaines de km en s’allongeant par terre à chaque pas. J’ai retrouvé aussi dans ma mémoire de touriste les très grands pieds dorés vénérés des immenses bouddhas couchés en Thaïlande. Et je me suis dit qu’ enfin, grâce à la douleur, j’avais appris à marcher en pleine conscience. J’ai vraiment expérimenté et intégré  la lenteur dans ma marche.

Vous voyez, je vous le disais, j’ai fait un grand pas aujourd’hui : un pas de Bouddha.

A part ça… j’ai mordu dans les 100 derniers kilomètres, et je ne compte pas desserrer les dents. Tant pis si ce n’est pas très bouddhiste. Là, je n’invoque ni l’escargot ni la tortue mais… le tigre.

************************

Le pèlerin très lent

Se rêve maintenant

En tigre dilettante

 

 

Commentaires

  • L’escargot étant hermaphrodite c’est ton côté féminin qui ne lâchera pas

Les commentaires sont fermés.