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Jour 60. Ultreïa !

El Burgo Ranero - Mansilla de Las Mulas 19 km. Cumul : 1335 km.

Hier je n’avais pas comme prévu offert de la musique sur le Chemin.

J’étais trop préoccupé par une fin d’étape difficile et en plus j’étais  rigoureusement seul pendant les deux dernières heures. Ce matin encore j’ai marché sans aucun pèlerin à proximité. Oui, c’est possible, surtout sur ces longues lignes droites, je ne sais pas pourquoi. J’ai tout de même repris Deezer et choisi cette fois les Cantates de Bach. Cette musique donne envie de croire en Dieu. Elle m’a vraiment aidé à rester serein dans l’épreuve de ces très longues lignes droites où une courbe est un événement. Mes pensées étaient claires, mon esprit apaisé. J’ai trouvé mon équilibre sur ce Camino Frances J’ai pris le temps de me tourner, de regarder cet horizon à 360 degrés, de rajouter un caillou aux offrandes de pied de croix.

Sur l’une des pierres empilées, j’ai retrouvé le mot « Ultreïa ». C’est une expression bien connue de tous ceux qui ont fait Compostelle. On peut traduire cette interjection venue du Moyen-Age par : en avant, plus loin, plus haut. Je pensais l’entendre souvent dans la bouche des pèlerins mais c’est plutôt, invariablement, un « buen camino » qui devient un peu saoulant à la fin, à vrai dire, même si, comme on dit, ça part d’un bon sentiment. Je préférerais cet « Ultreïa » qui peut constituer une magnifique devise.

A la réception du gîte, heureusement réservé, j’ai vu le gros tas de sacs à dos emmenés par véhicule. J’ai un peu de mal avec ça. J’en ai déjà parlé (voir jour 54). J’ai vu un graffiti il y a quelques jours disant : « Fuck the pilgrims tourists «. Et j’ai entendu plusieurs fois le mot « touristigrino ». Comme tous les éléments de nos vies, le  Camino est menacé par sa « mondialisation, massification, vulgarisation, marchandisation ».

Il faudrait être clair : aller à Compostelle n’est plus forcément un pèlerinage mais ce n’est pas une randonnée ni un voyage. Ce flot de marcheurs qui avancent dans la même direction doit avoir quelque chose d’unique. On se dit que si toute cette énergie déployée par chacun était mise au service d’une cause commune, on pourrait faire de  grandes choses. Peut-être ces grandes choses naissent-elles d’ailleurs ici, dans l’esprit épuré de celles et ceux qui, à condition qu’ils acceptent vraiment la durée, l’effort, la sobriété, reviennent dans la vraie vie avec une force nouvelle au service d’un monde nouveau qu’il est urgent d’inventer. Le Camino matrice d’utopies ? A condition qu’il ne devienne pas lui aussi un produit de consommation.

A suivre…

Au fait, ça n’a rien à voir mais j’ai constaté ce matin que les paons espagnols eux aussi disent « Léon », comme les paons français. Moi je parle depuis deux mois un anglais international avec ces pèlerins du monde entier, ce Babel qui a mal aux pieds, comme au dîner hier soir avec Kim le Coréen et « Oui-oui » la Taïwanaise.

Et je continue d’avancer vers Santiago. Demain je serai à… Leòn ! La dernière grande ville sur le parcours. Ultreïa !

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Dans ce flot de pèlerins

Je m’efforce d’être

Un poisson dans l’eau

Commentaires

  • C'est fou, je n'arrive pas à imaginer que tu vives vraiment tout ça, ce chemin de Compostelle. Certainement cela change quelque chose quelque part, dans toi certainement mais tu donnes certainement de la force à d'autres personnes pour d'autres aventures/projets. Un énorme bravo à toi

  • Encore un très beau texte ; après le doute tu sembles vraiment avoir trouvé ta voie. J’espère que tu feras un recueil de tout ça ! Ultreia donc à demain de te lire ! :-))))))))

  • coucou Yves ! super pèlerinage que tu fais. J'imagine que tout au long de ton chemin, tes pensées vont vers ceux qui te sont chers, qui de près ou de loin pensent à toi. Je ne manque pas de te lire chaque jour. Bravo, et bonne continuation. bises Yves !

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